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Karl Dönitz, commandant de la U-Bootewaffe puis GroßAdmiral

Par Alain Benoist – Administrateur du Mémorial des bunkers de Pignerolle
Karl Dönitz, dans son uniforme de Großadmiral.

Karl Dönitz, dans son uniforme de Großadmiral | Bundesarchiv

Il y est admis le 1er avril 1910 dans la Kaiserliche Marine (marine impériale). Par la suite, enseigne de vaisseau zélé de vingt-six ans, il est titulaire de la croix de fer de première classe pour faits d’arme en début de première guerre mondiale sur des croiseurs légers les SMS Breslau et Endem.

À partir d’octobre 1916 il est affecté à la nouvelle arme sous-marine. Il passe quelques mois à bord du U-39 et prendra ensuite le commandement du UC-25, U-Boot (Unterseeboot ou U-Boot au singulier et U-Boote au pluriel) mouilleur de mines.

Le 5 septembre 1918, il est nommé commandant du UB-68, qu’il est contraint de saborder le 4 octobre suivant. Fait prisonnier, il est emmené en détention à Malte où il reste prisonnier de guerre chez les Britanniques jusqu’à sa libération en juillet 1919. Il retourne en Allemagne vers 1920.

Ancien As de U-Boot de la première guerre mondiale, il a pu, au cours de ses affectations dans la marine de surface, vérifier ses intuitions concernant la mise en œuvre optimale de ses potentialités.

Entre les deux guerres mondiales et contre les décisions du traité de Versailles mais avec l’accord des Anglais, Hitler reconstitue une arme sous-marine dès juillet 1935, le Goßadmiral (grand-amiral) Erich Reader (commandant en chef de la Kriegsmarine) demande à Karl Dönitz de prendre en main la création de cette flotte. Kapitän zur See, il est nommé Führer der Unterseeboote (ou FdU soit commandant en chef de l’arme sous-marine, en charge de l’organisation opérationnelle et la communication entre tous les bâtiments) des trois premières flottilles : Wendigen, Johannes Los et Salzwedel.

La U-Bootwaffe, est maintenant dirigée par Karl Dönitz depuis Swinemüde (port polonais, Świnoujście, à la frontière avec l’Allemagne et occupé par les troupes allemandes) avec ses baraquements en bois du Weg des Todes (chemin de la Mort) proches de Wilhelmshaven ou à bord de son navire de commandement à Kiel le Weichsel mouillé en mer du nord alors que tout proche, le cargo Hamburg y est le navire-base des officiers sous-mariniers.

Lorsqu’il prend ses fonctions, le nouveau chef de l’arme sous-marine écarte tout de suite les bâtiments de type I car leurs grandes dimensions les rendent difficiles à manœuvrer. De la même manière, il recommande de ne plus construire de submersibles de type II, trop petit et d’une faible valeur militaire. L’effort va donc se porter sur le U-Boot de type VII. Type de submersible qui deviendra, au cours du conflit, le fer de lance de la U-Bottwaffe (arme sous-marine allemande).

Avant le conflit mondial, il embarque lui-même avec les premiers commandants sur les bâtiments nouvellement sortis. Il les inspecte ensuite au cours de leurs exercices de lancement de torpilles et les confirme dans leur commandement. Il profite également de toutes les occasions pour placer les U-Boote et leurs équipages devant de nouveaux problèmes. C’est ainsi qu’il les fera participer à la guerre d’Espagne.

En 1938, prétextant la menace des forces russes dans la mer Baltique, Hitler invoque la clause de sauvegarde du traité anglo-allemand le IIIème Reich qui disposera le 3 septembre d’un ensemble de cinquante-sept U-Boote, le même nombre que le Royaume-Unis.

Le 28 janvier 1939, Karl Dönitz est nommé Kommodore tout en restant Führer der Unterseeboote (ou FdU soit guide des sous-marins).

Le 17 octobre, après de la réception en grande pompe de Günther Prien par le Führer, le Befehlshaber der Unterseeboote (ou BdU soit commandant des sous-marins) est créé, en remplacement du FdU et donc Karl Dönitz devint BdU. Il devient également Konteradmiral (contre-amiral), il n’occupe donc le grade de Kommodore que 8 mois.

Karl Donitz suivi des ministres du gouvernement de Flensbourg, Alfred Jodl (en uniforme à gauche) et Albert Speer (en civil derrière Dönitz) lors de leur arrestation le 23 mai 1945

Karl Donitz suivi des ministres du gouvernement de Flensbourg, Alfred Jodl (en uniforme à gauche) et Albert Speer (en civil derrière Dönitz) lors de leur arrestation le 23 mai 1945

Karl Dönitz a une énorme capacité de travail et la volonté farouche d’atteindre son but. Sa volonté de fer, sa ténacité sans faille, son calme, sa circonspection, son sang-froid, son instinct, son enthousiasme pour le métier, son fanatisme et son patriotisme impressionne si fortement Hitler qu’il se sent animé lui-même d’une nouvelle assurance. Jusqu’au bout il affichera un calme et un air de confiance imperturbable.

Pour certains historiens, Karl Dönitz est devenu incontestablement l’un des principaux soutiens d’Hitler et, par là-même, de l’Etat nazi. Sous dépendance psychologique, il a totalement épousé la doctrine du Führer. Il soutient et encourage l’action et une relation privilégiée s’instaure entre les deux hommes. Seul de tous les dirigeants du IIIème Reich, il reste inflexible, désapprouvant tout manquement aux directives d’Hitler.

Ses nombreux entretiens avec ce dernier font qu’il n’échappe pas à la fascination d’un homme dont il admire, suivant ses propres termes la « personnalité puissante […] d’une intelligence et d’une capacité d’action extraordinaire, avec une instruction tout simplement universelle, une présence rayonnant la force et une immense capacité de persuasion ».

Karl Dönitz affiche presque autant de fanatisme que le Führer lui-même. Certains historiens le classe avec Goebbels et Himmler « parmi les chefs militaires les plus fanatiques » du régime nazi. Ses directives passées ou à venir sont autant de preuves d’allégeance totale à Hitler.

Les commandants et les hommes d’équipage des U-Boote vouent à Karl Dönitz un véritable culte. Appelé Oncle Karl ou der Löwe (le lion), il possède indéniablement le don de s’attirer tous les dévouements. Karl Dönitz cultive son aura en recevant personnellement les commandants de retour de patrouille pour lui faire part de leurs opinions et afin qu’ils lui proposent des perfectionnements, du moins tant que son Quartier-Général est à Larmor-Plage, près de Lorient. Il entretient ainsi un lien personnel indispensable entre le chef et ses subordonnés qui affrontent directement l’adversaire. La liberté de ton dont usent les sous-mariniers avec leur chef, alors même qu’ils sont cinq ou six grades en dessous de lui, ne va pas sans choquer les membres d’autres État-majors. En permission, les sous-mariniers arborent avec fierté leurs insignes qui impressionnent hommes et femmes.

Se disant pourtant apolitique, il adhère au parti nazi le 1er février 1944, avec le numéro 9 664 999. Membre tardif, fervent opposant au communisme et donc soutien fidèle d’Hitler (malgré ses affirmations d’après-guerre), il joue un rôle dans la répression du complot du 20 juillet 1944 (Opération Walkyrie) en prononçant un discours de soutien au régime le soir du jour de l’attentat. Il propose au Führer de faire adopter le salut nazi, bras et main droite tendus, dans toutes les unités militaires, « symbole de leur indéfectible loyauté au Führer et de l’étroite union des armées et du parti ».

Pour d’autre(s) historien(s), tout en admirant Hitler, il n’est pas un national-socialiste convaincu. Il reste avant tout un marin et un soldat et ne compte plus ses échanges acerbes avec les courtisans obséquieux que sont Göring, Ribbentrop ou Goebbels. Au procès de Nuremberg en 1945 il l’utilise dans son système de défense.

A la fin de son procès, il y est reconnu coupable de crimes contre la paix et de crimes de guerre pour lesquels il est condamné à dix ans à la prison de Spandau à Berlin qu’il effectuera dans son intégralité.

Karl Dönitz meurt d’infarctus le 24 décembre 1980.

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